Idées reçues sur l’emploi frontalier et le chômage

Idée reçue : Réserver les emplois aux GenevoisIdée reçue : Réserver les emplois aux Genevois

Les idées préconçues ont la vie dure, il n’est pas rare d’entendre des critiques formulées envers les frontaliers :

« Les frontaliers volent le travail des suisses, ils sont privilégiés, ils ont infiltré les service des Ressources Humaines des entreprises suisses… »

Ces critiques sont-elles fondées ou naissent-elles d’un ressentiment lié à la méconnaissance des conditions réelles de travail ?

L’observatoire Universitaire de l’Emploi de l’université de Genève a publié une étude sur la main d’oeuvre frontalière et le marché du travail Genevois qui met à mal de nombreux arguments.

Voyons en synthèse quelques une des conclusions de ce rapport face aux arguments des anti-frontaliers.

Méthodes de l’étude

L’étude porte sur 520 « candidatures test » adressées à des employeurs.

Ces candidatures présentent un profil équivalent :

  • jeune
  • célibataire
  • disposant du permis de conduire

Ils ont été répartis de manière égale entre :

  • des résidents suisses (avec des noms à consonance suisse) et des frontaliers (avec noms à consonance française)
  • des chômeurs et des travailleurs en activité.

Les profils postulent sur les postes suivants : vente, secrétariat, restauration, manutention, sécurité, soins infirmiers.

A chaque annonce, les analystes adressent donc 4 profils cohérents en tout point, dont seule l’origine géographique (Suisse / France) et l’activité professionnelle (en activité / chômeur) varient.

L’analyse des résultats montre des différences de traitement importantes entre les différents profils des candidats, voyons les point par point.

« Dans l’emploi, les frontaliers sont préférés aux Suisses »

C’est faux.

C’est une des critiques les plus souvent entendue : celle que les frontaliers seraient favorisés par les entreprises suisses.

L’étude de l’OUE démontre qu’il n’en est rien. Si en moyenne, 26% des candidatures suisses sont recontactées, seules 14% des candidatures françaises le sont, comme le présente le schéma ci-dessous.

A profil équivalent, le travailleur résident sera préféré au frontalier par l'entreprise suisse
A profil équivalent, le travailleur résident sera préféré au frontalier par l’entreprise suisse

 

Parmi les entreprises recontactant un des profils de candidat : 47% ne contactent que le candidat suisse, tandis qu’elles ne sont que 4% à ne recontacter que le candidat français.

Une « préférence cantonale » s’applique donc de fait, selon les auteurs de l’étude, elle peut être due à une meilleure connaissance des titres suisses et à une plus grande proximité géographique des candidats.

Ajoutons que la démarche de recrutement d’une personne située sur le territoire suisse sera forcément beaucoup plus simple (pas de permis de travail…).

« Ces entreprises qui ne recrutent que des frontaliers… »

C’est également faux.

L’étude analyse les réponses des entreprises selon le nombre de frontaliers qu’elles emploient.

Il ressort que les entreprises qui ont connu une croissance de leurs effectifs frontaliers ont encore plus tendance que les autres à recruter des profils de résidents genevois.

Les entreprises employant plus de frontaliers ont plus encore que les autres tendance à recruter des profils de résidents genevois
Les entreprises employant plus de frontaliers ont plus encore que les autres tendance à recruter des profils de résidents genevois

 

On note également que les entreprises aux effectifs stables mais employant beaucoup de frontaliers appliquent également une préférence plus marquée pour les travailleurs genevois.

« Les service RH qui emploient des frontaliers ne recrutent que des frontaliers »

C’est faux !

Cette critique revient régulièrement, elle est pourtant infondée. L’étude montre que quelque soit le lieu de résidence du recruteur, le résident suisse reste toujours préféré au candidat frontalier.

Le recruteur frontalier, comme le recruteur résident, tendance à privilégier le candidat résident sur Suisse
Le recruteur frontalier, comme le recruteur résident, tendance à privilégier le candidat résident sur Suisse

 

Comme le présente ce schéma, pour un recruteur frontalier, 75% des candidats suisses sont « recrutables », tandis que ce chiffre tombe à 50% pour un candidat non résident.

Chez le recruteur suisse ces chiffres sont moins élevés (62% et 38%) mais le traitement est équivalent.

Des arguments qui ont la vie dure

… et parfois mènent la vie dure aux frontaliers !

L’OUE explique à travers ses différentes études que ces arguments n’ont pas lieu d’être car l’emploi frontalier n’est là que pour palier à une pénurie de main d’oeuvre : pénurie de personnels ou de personnes qualifiés pour certains postes.

A ce titre une étude complémentaire très intéressante est disponible ici : Immigration, libre circulation des personnes et marché de l’emploi.

Tout le monde n’est pas logé à la même enseigne, et certains postes, ou profils peuvent être plus impactés que d’autres, et certaines entreprises peuvent recruter plus de frontaliers pour des raisons économiques ou politiques.

Mais cette étude démontre qu’il s’agit là de phénomènes marginaux (10% des postes de résidents au chômage), et que dans l’ensemble, l’emploi de frontalier n’a pas d’impact sur le marché de l’emploi des travailleurs résidents.

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